Le Parti Pirate Français s'est positionné en faveur de l'instauration en France d'un revenu de base, aussi appelé revenu universel ou encore allocation universelle. L'Équipage Économie estime que la motion actuelle est trop restreinte pour expliquer en détail les motivations et les modalités d'une telle mesure, représentant un changement colossal de paradigme sociétal. Il s'est donc proposé de redessiner plus précisément les contours de cette mesure, qui constitue le cœur de notre programme économique.
Le but concret de ce travail est de remplacer étape par étape la motion actuelle, en scindant le sujet en (pour le moment) cinq motions : argumentaire , interactions avec les autres mécanismes sociaux, montant et versement, modification des taxes et impôts, et enfin ultimement financement chiffré.
Nous utiliserons ici l'acronyme RdB pour Revenu de Base.
Cette motion est la première d'entre elles : un argumentaire détaillé en faveur de cette mesure, exposant les très nombreux éléments qui nous ont convaincu de la pertinence de cette mesure de très grande envergure.
Notre travail sur cette motion s’inspire partiellement de l’argumentaire développé avec soin par le Mouvement Français pour un Revenu de Base (MFRB), à la pointe sur ce sujet et dont le travail est d'une grande qualité : https://www.revenudebase.info/
Éradication de la pauvreté
Le caractère inconditionnel, individuel et immédiat du RdB permet à tout individu d’accéder à un moyen de subsistance sans qu’il ait à justifier de sa condition, ou d'un mérite nécessairement subjectif. En cela, il est profondément égalitaire.
La pauvreté génère également un coût économique : « Au-delà des difficultés humaines et sociales qu’elle génère, la pauvreté pèse lourdement sur la vie économique des sociétés. Elle bride la création de richesses en écartant un grand nombre de personnes de la vie professionnelle et elle s’accompagne souvent de maladies ou de troubles mentaux, etc. La pauvreté entraîne d’importantes dépenses destinées à corriger ses conséquences (dépenses de santé, dispositifs de suivi et d’insertion, etc.)." - MFRB
Par ailleurs, le caractère automatique du RdB permet d'éliminer le problème majeur de non recours aux aides sociale, phénomène répandu en France. Au lieu de devoir remplir dossier après dossier, souvent en ayant besoin de se faire assister par des associations pas toujours accessibles localement, l'aide est versée directement, sans avoir à la demander. Ainsi, la minorité illettrée encore présente en France, comme les nombreux foyers étant en grande difficulté pour comprendre les mécanismes administratifs souvent retors de notre pays, seraient enfin assistés de façon raisonnable par l'État qui les néglige trop souvent.
Nos sociétés modernes ont les moyens et les ressources pour éradiquer la pauvreté. Seule manque aujourd'hui la volonté politique de le faire. Une mesure telle que le RdB garantit à toutes et tous le droit de vivre décemment, qui devrait être une évidence dans notre pays. Il s'agit non seulement d'une nécessité morale, mais aussi d'un impératif économique sur de nombreux plans, dont ceux cité plus haut et ci-dessous.
Transformation de la notion de travail
Le RdB est une solution à une société de raréfaction de l’emploi, autrement dit, une société de chômage de masse dans laquelle les perspectives de croissance et donc de diminution du chômage sont faibles voire inexistantes. Et c'est sans compter les perspectives à de plus en plus court terme qu'amène l'accélération technologique en cours : l'automatisation, la robotisation et l'informatisation de nos économies déjà poussées vers les services va à coup sûr continuer de détruire des quantités gigantesques d'emplois dans de nombreux domaines, et cela dans un futur de plus en plus immédiat. Pour autant, le RdB permet de rémunérer chacun pour sa participation à la société, qui ne passe pas toujours par un emploi salarié : élever des enfants, s'investir dans le bénévolat, l'associatif ou le militantisme, créer une entreprise, étudier, contribuer à la création artistique et culturelle... Toutes ces activités apportent à nos sociétés, mais sont pourtant nettement moins soutenues et encouragées que le travail salarié classique, par ailleurs pas toujours plus utile à l'économie.
D'un autre côté, le RdB change la dynamique employé - employeur. Les notions de pression par le chômage de masse et de chantage à l'emploi sont fortement affaiblies, toute personne n’étant plus contrainte d’accepter un emploi par simple nécessité de revenu. Cette situation renverse au moins partiellement le rapport de pouvoir trop souvent défavorable aux employés, et incite l’employeur à proposer si ce n’est un salaire, au moins des conditions de travail plus satisfaisantes afin de trouver de la main d’œuvre.
De la même façon, cette mesure peut permettre une bien plus grande flexibilité dans le travail : horaires aménagés, temps partiel plus personnalisé, mais aussi moins grande inquiétude de démissionner pour se former à nouveau, passer en freelance, changer d'activité ou simplement prendre le temps pour chercher un emploi plus adapté. De même, cela donnerait bien plus de sécurité aux entrepreneurs, les soutenant dans les premières années de leur nouvelle entreprise où ils ne peuvent pas se verser de salaire, ce qui représente un vrai bénéfice pour l'économie, sans même passer par les gouffres financiers que sont trop souvent les subventions.
Émancipation individuelle
Instaurer un RdB dans notre pays représente un changement massif de paradigme administratif et économique, mais aussi sociétal. Cette allocation change beaucoup de dynamiques sociales, et de rapports de force, qui trop souvent sont nuisibles à notre société par leur déséquilibre. Le chantage à l'emploi dû au chômage de masse inévitable dans notre économie à la croissance faible a été évoqué précédemment, mais il ne s'agit pas de la seule relation de pouvoir qui serait impactée par cette mesure d'envergure.
En effet, d'autres aspects de notre société seraient fortement influencés, principalement dans la sphère familiale, mais pas que. La situation économique actuel pousse les jeunes, diplômés ou non, actifs ou non, à demeurer de plus en plus longtemps au domicile parental, souvent plus par nécessité économique que par choix. Cela limite leurs perspectives économiques, mais aussi sociales, et nourrit un cercle vicieux empêchant leur émancipation et leur contribution plus active à la société. Une telle aide, à montant partiel pour les mineurs partiellement reversée à leurs responsables légaux, devient strictement personnelle à la majorité. Ainsi, elle aiderait les jeunes à prendre leur envol plus tôt, les laissant libres de réaliser leur projets personnels, étudiants et professionnels plus facilement.
Dans les cas plus extrêmes, mais toujours présents, de jeunes adultes vivant dans des foyers abusifs, cela leur donnerait une porte de sortie bien plus rapide et efficace que n'importe quel autre système d'assistance envisageable. De même, les jeunes adultes brutalement poussés hors du foyer à leur majorité, que ce soit pour des raisons économiques, affectives ou simplement abusives (à l'image des trop nombreux jeunes homosexuels rejetés par leur famille et en danger immédiat), seraient ainsi bien mieux protégés, et capables de briser leurs chaînes sans être terrifiés par un avenir terriblement précaire.
En outre, cet argument émancipatoire est également valable pour les femmes prisonnières de compagnons ou maris abusifs (la réciproque existant, bien que moins présente dans notre société), et étant forcées de rester avec eux par pure nécessité économique. Avec ce genre de filet de sécurité, leur échappée, incluant également leurs potentiels enfants, serait enfin rendue possible à la hauteur nécessaire, qui n'est pas atteinte aujourd'hui en France.
Enfin, de trop nombreux citoyens et citoyennes sont repoussées hors du débat politique par le manque de temps et d'énergie qu'implique la précarité. Leur donner les moyens de regagner ce temps, de même que l'énergie pour réinvestir la sphère démocratique, permettrait à notre République de fonctionner bien plus comme elle le devrait, au lieu d'exclure des pans entiers de la population dont la voix n'est pas assez entendue.
Simplification administrative
Argument concernant plus l'État lui même que la population, le RdB permettrait une simplification immense dans l'appareil administratif national comme local. De très nombreuses aides existant à l'échelle des départements et des régions, comme par exemple le RSA. La suppression de cette aide, comme d'autres, induite par l'instauration d'un RdB, soulagerait les administrations locales, départementales et régionales ( nota bene : le Parti Pirate s'est déjà positionné pour la suppression totale des départements).
De façon encore plus significative, le remplacement massif d'aides sociales provoqué par l'apparition d'une allocation unique et universelle permettrait une bien plus grande efficacité en matière de répression des fraudes, le système devenant immensément plus transparent que le millefeuille actuel. Tout aussi important, il autorise une réduction massive de la masse salariale chez les fonctionnaires nationaux, et la redirection d'une partie d'entre eux vers les mécanismes de répression des fraudes aux impôts et taxes, la fraude aux allocations étant complètement éliminée. En plus de représenter une bien plus grande lisibilité pour les contribuables en matière d'impôts et de dépense publique, le RdB aurait comme conséquence des économies d'un ordre colossal pour l'État, participant directement au financement de la mesure, qui sera détaillé dans le futur point de programme du Parti Pirate concernant son chiffrage.
Sources
Le Parti Pirate propose la mise en place d’un revenu de base (RdB) basé sur la citoyenneté dans le sens défini par le Mouvement Français pour un Revenu de Base, à savoir comme un « droit inaliénable, inconditionnel, cumulable avec d’autres revenus, distribué par une communauté politique à tous ses membres, de la naissance à la mort, sur base individuelle, sans contrôle des ressources ni exigence de contrepartie, dont le montant et le financement sont ajustés démocratiquement. »
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